Un vieux film documentaire français avait pour titre “Chili, le pays du malheur”. Cela fit son effet, car il y avait peu de films sur le pays. A bien des égards, c’était exact. Les immenses paysages et leur pureté donnent l’impression qu’ils viennent tout juste de naître : cela est dû aux tremblements de terre, aux tsunamis, aux éruptions volcaniques et aux inondations andines qui redessinent entièrement ces paysages à chaque génération. Un géophysicien a dit que cette planète est encore en train de se faire et que le Chili en est la dernière étape. Ensuite la Terre commencera à mourir. Les extrêmes sont violents dans ce pays, c’est pourquoi les études internationales relatives à la vie sur d’autres planètes se concentrent sur deux zones, Atacama dont le désert est le plus aride et la zone antarctique du Chili où la glace est toujours prise.
Comment vit-on dans un tel pays? En considérant, à la façon d’un païen, chaque jour comme le dernier, ou bien, comme un mystique, en ayant pleine conscience de ce que tout vit et meurt sans cesse.
Dans notre groupe, nous pensons que l’architecture et les villes chiliennes devraient être en phase avec cette réalité et suivre les mots fameux de Hölderlin : “C’est poétiquement que l’homme vit sur cette terre”…
Grâce à l’architecture, et grâce à la littérature et aux essais, nous avons travaillé dans un contexte latino-américain (surtout la Bolivie et la Colombie, en plus du Chili), dans une vision géopoétique de la région en faisant des propositions géopoétiques pour habiter en des endroits particulièrement sensibles (Atacama, Île de Pâques, Araucania, Patagonie), mais également dans les principales villes — de façon à ce que les paysages chiliens soient conservés et continuent à nous offrir ce que tant de personnes ressentent lorsqu’elles les fréquentent : l’impression d’être les découvreurs de ce territoire inexploré où la terre donne une énergie encore brute. Pour avoir une illustration de cette idée, allez visiter le site internet www.cazuzegers.cl , allez à “Publications” et, de là, ouvrez le livre “Cazú Zegers, prototipos en el territorio”. Sur le même site, vous pouvez voir son dernier ouvrage, l’Hotel Tierra Patagonia, un exemple d’architecture géopoétique contemporaine. Les ouvrages de Zegers sont considérés comme étant parmi les plus intéressants des architectes qui ont suivi les thèses de l’Escuela de Arquitectura de l’Université catholique de Valparaíso, née dans les années 60 avec une orientation géopoétique.
Pendant cinq ans, nous avons eu à notre disposition une belle et grande maison grâce à un excellent ami : “Observatorio de Lastarria, un endroit pour regarder le Chili”. Durant ces cinq années, de juin 2006 à décembre 2010, nous avons inauguré dix-huit expositions d’arts visuels et présenté plus d’une centaine d’événements : films, lectures poétiques, musique et conférences sur tous sujets en rapport avec le Chili : les oiseaux, l’eau, l’architecture, la toponymie, l’urbanisme, la poésie, la géologie…
Avec l’architecte Cazú Zegers pour présidente et l’écrivain Miguel Laborde pour directeur culturel, un groupe permanent a œuvré durant ces années afin d’ouvrir la ville — Santiago — à de nouveaux chemins pour penser le pays ; groupe notamment composé d’Alejandra Sánchez Mena (designer), de Gonzalo Salamanca (sociologue), de Roberta Gandolini (artiste) et de Juan Pablo Almarza (architecte).
Un jour, à cette époque, Georges Amar, qui se promenait dans le voisinage, aperçut notre maison, l’apprécia, y entra et lut sur le mur qu’elle était dédiée aux études et événements géopoétiques. Stupéfait, il s’informa et nous fit part de la coïncidence avec ce même mot : la géopoétique.
Il nous parla de Kenneth White et de l’Institut, nous avons alors débuté une correspondance avec Kenneth, il nous envoya certains de ses livres et des Cahiers de Géopoétique, après quoi la stupéfaction changea de côté : des points communs, des choses inconnues, un vaste espace pour évoluer et faire des découvertes au sein d’un réseau mondial.
Ainsi, en quittant la maison, nous nous sommes concentrés sur des travaux et des études, et depuis l’année 2011, nous sommes affiliés à l’Institut international de géopoétique, en tant qu’îlot chilien de son archipel. L’espace virtuel a pris de l’importance, avec des textes hebdomadaires sur la géopoétique venus de tous horizons mais sur des sujets surtout sud-américains. Ce fut une vitrine majeure pendant deux ans, avec des centaines de lecteurs de quatorze pays différents ; ces textes sont encore tous accessibles à cette adresse : http://blogelobservatorio.blogspot.com
Nos activités professionnelles nous ont contraints à interrompre la périodicité hebdomadaire du blog. En partie parce que dès 2009 nous avons publié des textes dans La Panera, le magazine d’art le plus diffusé au Chili (vingt-cinq mille exemplaires) ; à deux occasions, et de façon tout à fait directe, nous y avons parlé de Kenneth White et de l’Institut. La totalité de ces articles sont également lisibles, sur le site www.lapanera.cl sous le titre “La columna de Miguel Laborde”.
De façon parallèle, Cazú Zegers à l’Universidad del Desarrollo et Miguel Laborde à l’Universidad Diego Portales, ont partagé leurs conceptions géopoétiques avec des étudiants jusqu’à aujourd’hui (2015).
L’année 2014 a été toute particulière puisque notre présidente, l’architecte Cazú Zegers, s’est rendue à Paris pour le colloque sur la "Géopoétique de la ville", pour y faire une présentation de la région d’Araucania, au sud du Chili.
Grâce à cette carte et aux trois documents pdf présentés ci-dessous, découvrez les activités du centre :
— Observatorio de Lastarria (en espagnol & anglais)
— Arquitectura (en espagnol & anglais)
— Mata Ihi & Microcosmos (en espagnol)
En 2015, l’architecte Gonzalo Schmeisser — qui a étudié les concepts de la géopoétique ici et là —, a ouvert un site internet avec deux de ses collègues, dédié à l’architecture et aux paysages, et travaillant avec un autre groupe aux idées affines.
Voici son adresse : www.landie.cl.
Le poète Cristián Arregui coordonne depuis 2014 les activités du Grupo Geopoético de la Patagonia, implanté dans la ville chilienne de Puerto Aysén. L’environnement montagneux, avec la pluie et les rivières, est fort, tout comme l’habitat humain qui dispose ses maisons de bois autour des fours. Chaque élément, à sa façon particulière, sauvage, est le centre d’un cosmos plein de vie.
Le groupe est aussi composé de Johanna Contreras (professeure et tisserande), Tania Morgada (photographe), Cristina Pustela (artiste visuelle), Pablo Lema (artiste visuel) and Rubén Álvarez (sociologue).
Le groupe a trouvé en Kenneth White, Régis Poulet et Miguel Laborde — parmi d’autres — des compagnons et des guides sur les pistes conduisant au dialogue avec la terre ; il développe des exercices et des ateliers qui visent à restaurer une profonde et intense relation avec la Terre.
Cristián Arregui est également directeur du magazine Provinciana, une publication de la maison d’édition de l’Université de Valparaíso, qui étudie lui aussi le lien entre la Terre et la Parole, en s’intéressant tout spécialement à l’avantage de résider en province.
Miguel LABORDE